La mise en place du Compte Personnel de Prévention de la Pénibilité (C3P) constitue une importante innovation sociale et place les enjeux de santé au cœur de la stratégie des entreprises.
« La pénibilité est caractérisée par une exposition à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels, liée à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail, susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé » (Articles L. 4121-3-1 et D. 4121-5 du code du travail).
La reconnaissance administrative du lien entre pénibilité et santé permet d'ancrer dans les esprits l'impact des conditions de travail sur la santé et fonde l'acquisition d'un droit. Le compte pénibilité offre en effet des droits nouveaux à des salariés qui, en raison des facteurs de pénibilité auxquels ils sont exposés, peuvent subir une réduction de leur espérance de vie et donc de leur durée de retraite.
Le dispositif sert de révélateur et d'aiguillon à la fois pour les entreprises et pour les salariés :
Dans un objectif de prévention le compte pénibilité incite d'abord les entreprises à évaluer et ajuster leurs méthodes de travail pour réduire les facteurs de pénibilité à la source et les salariés à se former afin d'orienter leur carrière vers des emplois qui exposent moins à la pénibilité. Ainsi, la vocation première du C3P n'est pas de favoriser des départs anticipés, mais de diminuer les conditions de travail pénibles.
Plus de 25 ans après l'adoption de la directive-cadre de 1989, la culture de prévention demeure en France encore globalement en mode mineur. En 2014, plus de 620 000 accidents du travail, dont 530 mortels, et plus de 51 000 maladies professionnelles ont été́ reconnus au titre du régime général. La prévention dispose d'une place qui n'est pas encore à la hauteur des enjeux en raison de la prééminence de la logique de réparation sous-tendant l'offre de soins.
Le dispositif C3P aura atteint son objectif premier, non pas si le nombre de ses bénéficiaires et des points pénibilité attribués sont importants, mais au contraire si ceux-ci diminuent régulièrement. Il s'inscrit dans la stratégie plus large du troisième Plan de Santé au Travail dont l'enjeu est de répondre aux besoins conjugués de l'évolution démographique (vieillissement de la population active et usure professionnelle), de l'allongement de la durée de la vie professionnelle, et de l'expansion des maladies (notamment les affections de longue durée, les cancers et les maladies chroniques évolutives).
La vraie réussite du C3P serait son extinction, faute de bénéficiaires, du fait de l'efficacité des politiques de prévention développées.
L'identification et l'analyse des risques peuvent être réalisées soit par une ressource interne à l'entreprise dans la mesure où celle-ci a été formée et dispose des compétences en matière de santé et sécurité au travail (SST), soit par une ressource externe ayant le statut de d'Intervenant en Prévention des Risques Professionnels (IPRP).
Les outils d'analyse et d'évaluation développés par l'IE2ST (SRP+ et SP+) font intervenir des IPRP dont la compétence est reconnue, en possession d'agrément DIRRECTE et d'assurance professionnelle en cours de validité.
Le point de départ de l'évaluation de la pénibilité est le Document Unique ou DUERP.
Le document unique doit comporter en annexe, un volet pénibilité qui indique la proportion de salariés exposés aux facteurs de pénibilité. C'est ce volet qui sert de base à l'évaluation de la pénibilité du salarié.
Pour chaque salarié concerné, il convient d'évaluer si les seuils présents dans les référentiels en vigueur sont dépassés et ouvrent ainsi le droit à la pénibilité.
Ces seuils sont définis par l'article D. 4161-2 du code du travail, qui introduit des limites associées à chaque facteur de pénibilité. Ces seuils comprennent une double dimension d'intensité et de temporalité. Le dépassement ou non des seuils est apprécié après application des mesures de protection individuelle et collective.
Il convient de rappeler que l'objectif est d'identifier les personnes qui sont fortement exposées, c'est à dire au-delà de ces seuils. Il faut donc lire les seuils suivants comme des facteurs d'exclusion : une personne qui n'est pas exposée en intensité ou en durée au-delà des seuils fixés à l'article D.4161-2, n'est pas éligible au compte personnel de prévention de la pénibilité.
Depuis le 1er janvier 2017, toutes les entreprises, même celles qui ne comptent pas parmi leur effectif de salariés exposés à des facteurs de pénibilité, doivent verser une cotisation dite « de base » (Article L. 4162-20 du code du travail).
Cette cotisation est due par toutes les entreprises privées agricoles et non agricoles au titre de la solidarité interprofessionnelle.
Son taux est de 0,01% de la masse salariale.
Une cotisation dite « additionnelle » est due par les entreprises employant des salariés exposés à des facteurs de risques au-delà des seuils depuis l'exercice 2015.
Son taux est calculé à partir de la masse salariale des salariés exposés à la pénibilité.
Le taux de cotisation est doublé lorsque les salariés sont exposés à plusieurs facteurs de pénibilité.
Salarié exposé à | Taux en 2015 et 2016 | Taux en 2017 |
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Un seul facteur | 0,1% | 0,2% |
Plusieurs facteurs | 0,2% | 0,4% |
Le rapport Bonnard-Pilliard transmit au Premier ministre en date du 21 novembre 2016, sur l'apport du dispositif pénibilité prévoit une hausse des cotisations : « Il n'est pas possible à l'heure actuelle de calibrer précisément le taux futur de la cotisation additionnelle, même s'il est très probable qu'il a vocation à augmenter progressivement ».
D'où l'importance de la mise en place de mesures d'amélioration individuelles et collectives, afin de limiter les effets de ces augmentations à venir.
An matière de santé et de sécurité au travail, le Code du travail a édicté de nombreuses lois sont le non-respect est sanctionné par ce code mais peut l’être aussi au titre du Code pénal, qu’un accident se soit produit ou non.